Il y a une vidéo de David Marquet que j’aime beaucoup montrer en formation. Ce Capitaine de sous-marin explique comment il a réussi à diriger le SANTA FE et son équipe alors qu’il était formé pour un autre sous-marin. Il a mis en place une méthode de l’engagement d’équipe en 3 piliers que nous allons voir dans cet article. D’ailleurs, ils ont eu les meilleures évaluations suite à cette approche.
Le fonctionnement d’un équipage militaire sous-marin est très directif hiérarchisé. Le capitaine est censé tout savoir et donner les ordres nécessaires au bon déroulement de la mission. Or, le capitaine du Santa Fe ne connaissait pas la machine. Il avait le choix entre 2 options : étudier pendant 1 an avant de faire quoi que ce soit ce qui n’était pas possible vu qu’il était déjà affecté dessus ou compter sur la compétence de son équipage.
Or quand on ne peut pas donner des ordres il faut changer de mode de management. L’équipe doit s’investir et être motivée pour que tout se déroule selon la vision.
1er pilier de l’engagement dans une équipe : La vision (purpose)
Dans tout projet, la vision doit être le point de départ.
D’abord il y a la vision globale : pourquoi travaille-t-on ? Que cherche-t-on à accomplir ? Quels bénéfices apportons-nous au monde ou à nos clients ?
Ensuite, les objectifs intermédiaires qui mis bout à bout vont permettre de s’approcher puis de réaliser la vision.
Notre capitaine connaît l’objectif de la mission, il est capable de la décomposer en objectif intermédiaire : s’approcher d’un navire sans être remarqué, se placer afin d’attaquer,… Ce sont exactement ces éléments qui vont permettre à son équipage de réaliser cette vision avec leurs compétences.
Ainsi même le machiniste sait que le sous-marin est en position où il ne faut pas se faire remarquer par l’ennemi. Ce n’est donc pas le moment de lancer des activités bruyantes. Le machiniste sait également profiter d’un déplacement en zone sécurisée pour faire toutes les réparations bruyantes qu’il a besoin de faire.
2ème pilier : La maitrise (mastery)
Une fois que l’équipe sait ce qu’elle est censée réaliser, on passe à l’étape de mise en œuvre. Dans cette phase, le capitaine ne pouvant pas décortiquer les différentes phases de travail, il est indispensable que chaque équipier sache ce qu’il a à faire dans le contexte donné. Cela signifie que chacun doit connaitre le contexte exact (transparence sur la situation actuelle), les besoins, la cible et son travail personnel.
Imaginez un chef qui doit superviser la création d’un repas. Il peut indiquer à chaque membre de sa cuisine les étapes nécessaires : casses les œufs, verse les dans un saladier, prends un fouet, bats les œufs, beurre la poêle, mets la à chauffer …
Ou demander de faire une omelette en s’appuyant sur le fait que son équipier maîtrise la technique.
Lorsqu’on a besoin de compter sur son équipe pour réaliser la vision, il est donc indispensable d’avoir une équipe qui a toutes les compétences nécessaires ainsi que la connaissance du contexte et qui maîtrise son métier. Ici la formation est un indispensable pour être en mesure de concrétiser la vision.
3ème pilier : L’autonomie (autonomy)
Le dernier pilier pour le bon fonctionnement d’une équipe est l’autonomie. Dans une organisation très hiérarchisée, les ordres arrivent du haut de la pyramide de commandement jusqu’au bas de la pyramide. Les membres ont peu voir aucune autonomie dans leurs activités.
Lorsque le haut de la pyramide est dans l’impossibilité de donner les bons commandements, il devient nécessaire de pouvoir s’appuyer sur le reste de la pyramide pour avancer vers l’objectif.
Nous avons vu jusque-là que l’équipe avait besoin de maîtriser son sujet et de savoir où elle est censée aller. Il reste l’autonomie. Lorsqu’il est autonome, chaque membre a la possibilité de prendre la bonne décision au bon moment et de réagir rapidement. Ce qui peut être utile sur un sous-marin. Quand les responsables limitent l’autonomie, l’équipe doit demander la validation de chaque décision ou initiative à toute la chaîne de commandement. Entrainant ainsi de considérables pertes de temps.
Lors d’une de mes missions, j’étais experte sur mon périmètre mais je n’avais aucun pouvoir décisionnel. Donc à chaque décision, je devais faire un mail récapitulatif de la situation à mon N+2. Ce mail expliquait les différentes solutions ainsi que la raison pour laquelle je préconise une solution plutôt qu’une autre. Ce dernier a toujours validé mon choix sans toujours comprendre l’intégralité des tenants et aboutissants du sujet.
L’engagement de l’équipe
L’équipe qui détient à la fois les compétences, la vision et l’autonomie nécessaires à la réalisation de la mission, possède tous les éléments nécessaires pour évaluer sa capacité à réaliser la vision. Elle est donc en capacité de s’engager ou d’émettre des réserves quant à sa réussite.
Les deux premiers piliers, la vision et la maîtrise permettent une réelle efficacité dans l’exécution d’une réalisation. Encore une fois, si l’on se positionne dans la cuisine d’un grand restaurant, on ne verra jamais le chef décrire chacune des actions à réaliser. En revanche il dira à haute voix « 3 mijotés de veau » et toutes les personnes intervenant dans la préparation sauront quoi faire et dans le bon ordre.
Cependant, si l’on veut que chacun est un véritable engagement, à savoir pouvoir s’engager sur une tâche, alors le troisième pilier de l’autonomie est indispensable !
En conclusion
En tant que responsable d’équipe, vous avez la responsabilité de mettre votre équipe dans les meilleures conditions pour réussir les projets. Un mode de management collaboratif nécessite une responsabilisation et un engagement de l’équipe. En adoptant la transparence sur les objectifs, en vous assurant de la maîtrise de votre équipe, et en leur laissant l’autonomie nécessaire, vous leur donnez les clés pour s’engager pleinement dans la réalisation des objectifs. Il ne vous reste plus qu’à les aider à grandir et les motiver pour la réussite.
Les membres d’une équipe ne sont pas automatiquement en maîtrise des tâches à réaliser. Une étape de formation est indispensable, et doit être structurée autour de la vision. En effet, la culture commune permet à la vision de pouvoir s’exprimer correctement. C’est la raison pour laquelle, une équipe de sport nationale essaiera toujours de passer du temps pour construire un collectif : tous les joueurs sont des experts mais ils doivent se forger une culture commune pour comprendre la vision du coach.