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Une histoire de nougat – Psychologie d’un achat

Une histoire de nougat

Hier, nous visitions Grasse. La ville des roses, parfums et autres plaisirs de Provence. Parmi ceux-ci le nougat artisanal avec une histoire à raconter sur la psychologie d’achat. Les rues étaient étroites, les maisons petites et les boutiques colorées. On croirait avoir fait un voyage d’un autre temps si le florilège de masques n’était pas présent pour nous rappeler de l’époque où l’on vit. Par souci de coquetterie, comme pour nous accueillir et protéger du soleil, sur la ville flottaient une multitude de parapluies roses.

Au fil de la balade, nous sommes passés devant une boutique de nougats. Sur la devanture, un énorme chaudron a attiré mon regard. N’étant pas très fan de cette sucrerie, je suis entrée photographier le chaudron et suis repartie.

La première approche

Au retour, nous repassons devant la boutique. De cet angle là, nous voyons de dehors : des meules de nougat énoooormes. Ces friandises attirent le regard de mes compagnons de tourisme qui s’arrêtent pour admirer. A ce moment, une vendeuse souriante et serviable nous invite à goûter. Elle nous décrit les différents produits proposés. Du nougat royal, du nougat pistache, caramel, praline ou encore Nutella. Il y en avait pour tous les goûts. Même du nougat sans sucre ! (si on accepte de considérer le miel comme étant un produit sans sucre)

Les gourmands dans notre groupe n’attendaient que cela. Ils ont pris plaisir à tester 1 ou 2 goûts de nougat.

Cet accueil est soigné et agréable. De plus la vendeuse nous fait dire “oui” à la question “voulez-vous goûter ?” ce qui crée un lien positif avec le client. Il sera moins tenté de dire non plus tard. La psychologie est préparée pour un achat potentiel.

La négociation

Quelqu’un de notre groupe, finit par craquer et demander à acheter un bout de nougat. Le vendeur saisit la meule associée et demande si une coupe à un endroit convient. L’acheteuse effarée par la taille dit que c’est trop pour elle. Heureusement, une autre personne du groupe souhaitant être serviable propose de partager l’achat.

En entendant cela, le vendeur dit “Ah c’est pour vous deux. OK ! que diriez-vous de cette coupe ?”. Associant le geste à la parole, il ajoute 500 bons grammes à la quantité déjà identifiée.

Dans cet échange, les deux parties ont des objectifs différents :

Si l’acheteur perd son objectif de vue devant l’argumentaire d’un vendeur entraîné il y a des chances qu’il reparte mécontent. D’ailleurs c’est ce qui va se passer ! Observons l’évolution de la psychologie d’achat du client.

Les deux clients protestent timidement. A ce moment, le vendeur les laisse un peu discuter puis accepte de se rapprocher un peu plus de sa coupe initiale. Puis les deux clients finissent par dire oui mais très peu convaincus.

Cependant pendant qu’il coupe, le vendeur oriente son couteau (hache ?) en biais doublant au moins la largeur convenue avec les clients.

Là, le vendeur est clairement malhonnête. Par contre aussi surprenant que ça puisse paraître aucun des deux clients n’objecte ni ne reprend le vendeur. Est-ce pour être conciliant ou un renoncement ? Ou est-ce la peur du conflit inculquée par notre éducation ?

La transaction

Nos deux clients passent à la caisse avec pour plus de 30€ du même nougat chacun.

Et ensuite

L’un des deux clients souhaitait initialement du nougat Nutella. Il hésite devant la meule en question. Et demande au vendeur s’il peut en avoir un petit bout (sous entendant 50 à 100g). Le vendeur se saisit de la meule et montre une coupe en demandant si comme ça c’est bon. Le client voyant la quantité beaucoup trop importante renonce à en acheter complètement pour ne pas se retrouver avec une quantité improbable d’un produit qu’il déguste très occasionnellement.

Le client finit par dire “Non” au vendeur ! A ce moment il y a à la fois un lien de confiance rompu qui pousse à dire non. Et surtout, la phase de négociation n’étant pas entamée, il est beaucoup plus facile de s’arrêter là. Quand une négociation est entamée, il est très difficile d’annuler complètement la transaction ce qui est vécu comme un échec / un retour arrière ou encore une perte de temps pour l’autre et donc avoir une image négative aux yeux de l’autre et des autres clients !

Le vendeur quand à lui ayant compris qu’il ne réaliserait pas d’autre vente avec le groupe s’est désintéressé de nous pour aller vendre du nougat à la truffe à des nouvelles clientes touristes.

Le départ

Finalement nous sommes repartis. Les deux clients avec leur sac à la main et la critique à la bouche. Les autres qui avaient observé la scène étaient heureux de ne pas avoir craqué dans cette boutique.

Ce qui est sûr c’est qu’aucun d’entre nous ne reviendra en acheter là ! La psychologie d’achat s’est transformée en psychologie de rejet …

Ce que nous tirons de cette histoire, c’est que l’expérience client et le lien créé un instant donné est fragile ! Il faut l’accompagner tout au long de la transaction et ne pas céder à l’appel du gain facile. En effet, entre un gain facile unique et une relation créée sur le long terme, le gain sera bien plus important, pour le vendeur tout comme le client.

L’autre morale de cette histoire c’est que l’utilisation volontaire de biais cognitifs pour déclencher l’action d’achat est à prendre avec des pincettes et qu’il faut bien étudier la psychologie avant de s’en servir au risque de créer de grandes frustrations chez le client …

Enfin, je vais surement ajouter à ma nouvelle routine quelque chose pour apprendre à dire non plus facilement et éviter de me faire avoir par ce genre de techniques !

Pour en savoir plus sur les techniques des vendeurs :

https://www.bonnegueule.fr/les-techniques-des-vendeurs-pour-vous-faire-acheter-plus-et-comment-les-contrer-12/

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